Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
louisianecheznousautres
louisianecheznousautres
Publicité
Archives
17 février 2014

vie active et droit du travail

Je croyais en avoir vu de toutes les couleurs sur le monde du travail : dans les milieux du show-business plus crapuleux qu’ils ne le montrent, des petits boulots étudiants et parisiens, les heures sup' pour fauchés, les boulots saisonniers et de l’animation ou de l’intérim, dans l’associatif où la frontière entre professionnels et bénévoles est ténue, et puis tu débarques ici…

Aucun droit du travail, que des devoirs du travailleur…

 

Monde d’une violence inouïe, violence telle que vous vous réveillez pour aller bosser, la boule au ventre, et le pire : c’est que vous finissez par vous y habituez. Accoutumance protectrice pour réussir à continuer… pas le choix, faut faire avec, et vous finissez par vous oublier, en pilotage automatique, résignation, ici tous sont éteints de l’intérieur. Ne pas penser, avancer. Survivre, pas le droit de sortir dehors, peur d’être pris en flagrant délit d’abandon de son poste, parce que vous ne tenez plus : il faut bien pisser, après le déjeuner, et laisser les mômes que vous surveillez… Alors vous y allez au pas de course, et en cachette… A 44 ans bientôt? Délirant, non? Et moi qui plaignais les caissières du Liddle de Vallon…. Avec leurs 7 minutes chrono de toilettes par jour, et pas de chaise aux caisses, mais ce serait du luxe ici !!! Je prends de suite moi, ces 7 minutes !

Pas le temps de manger, rien le droit de dire, qu’a-t-on donc fait pour mériter ça ? Esclavage des temps modernes?

Plus les conditions sont médiocres, plus la direction en rajoute, et plus vous vous éteignez à petit feu, par petites touches, presque indolores et invisibles.

Mais vous réalisez l’ampleur des dégâts, après trois jours de congés : pour vous réaccoutumer à la violence imposée, c’est douloureux, votre corps et votre esprit se débattent comme gibier pris au collet, luttant et se débattant, dépensant de l’énergie vainement pour être encore plus serré…

Faut reprendre le rythme, faut se résigner à nouveau. C’est une guerre, on va au front, à nouveau. On est quoi, ici ? On bosse à la chaîne, on est ferré, ligoté. On a signé. "Plus jamais, je ne regarderai un travailleur immigré de la même façon" : me disait une collègue. Ce sont des héros des temps modernes, qui ont tout quitté, acceptant des boulots sous-payés, qui vous mettent minable, pour envoyer toute la paie aux familles, paie minorée par ce que se prélèvent au passage, les banques des deux pays, pour les frais de devises…. Ben voyons.

Mais qu’est ce qui me retient ici, alors ?

L’aventure. Car ce qui ne nous tue pas, nous rend plus fort : mes petites tracasseries franco-françaises me feront désormais bien marrer : plus rien à carrer. Je serai immunisée. Mais, je ne ferai pas racine ici non plus… Ca aussi c’est sûr ; d’ailleurs, j’ai relu ce mail d’une compatriote… Vu de la France, je trouvais qu’elle y allait fort, qu’elle noircissait le tableau,  bref je ne me sentais ni touchée ni vraiment concernée. Et puis le relisant ici, ce mail prend une toute autre teinte, il fait écho, avec une résonnance tellement authentique, que c’en est troublant, vraiment… Tout ce qu’elle dit me semble vrai, et pas même exagéré, c’est confondant…et guère rassurant… Faut pas importer leur modèle. Faut arrêter de suite!!!

 

Une américaine me dit aujourd'hui que les profs sont pauvres. Je lui réponds, que je ne connais pas de pays où ils sont vraiment riches, et d'ailleurs en France on n'est encore moins payés qu'ici, puisque la vie y est plus chère. Elle me rétorque illico : "Vous avez peut-être moins d'argent mais vous êtes de toute façon plus riches que nous, ne cerait-ce que par ce que vous voyez, vous goûtez, tout ce qui existe en France, et qui n'existe pas ici : votre culture, votre patrimoie et toutes les beautés du passé..." Bien vu l'américaine... qui n'est jamais sortie de son Etat, ni quasiment de sa ville....

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité